C’est une vaste terre brune qui glisse sous le vent. Les plantes sont rêves à ras du sol. Asséchées, comme aspirées par le ciel et saignées de toute sève, elles ont les positions tordues des égorgés. Leurs tiges sont de petits bras ridicules de bois sec.
Aucun signe, au seuil de l’azur, de quelque trace frêle de vie.
Tout est effacé. Il n’y a plus ni terre ni mer, ni plaines ni montagnes ; il n’y a plus que les amas croulants de cette épaisse poussière dorée d’un monde qui a du éclater.
C’est une vaste terre brune austère et inhospitalière. Tanaris n’est pas une destination de voyage. Tanaris n’est pas une terre que l’on chérit. On maudit son haleine brûlante, l’aridité de son cœur, l’inflexibilité de son caractère.
Une main remonte sur sa hanche, glisse lentement sur son flanc comme pour en apprivoiser le relief. C’est une main calleuse, sèche. Celle d’un guerrier habitué à serrer une arme dans sa paume. Elle est également pudique, d’une étrange douceur. Elle laisse sur la peau blanche de la chaleur et un parfum d’abricot.
Il faut aiguiser ses sens pour braver Tanaris. Ici l’ironie cinglante des bourrasques qui assèchent la gorge. Ici le ciel est dégagé. Nu et solitaire, il pèse de son bord tranchant sur l’horizon. Il respire. Resserre l’étreinte de ses bras autour d’elle. Ses lèvres touchent le front. Il la frôle jusqu’au sang. Là-bas il y a du bruit. Celui d’une source. Là-bas se dessinent de hautes silhouettes dont les pas soulèvent une fumée âcre. Hommes, femmes et enfants ont la même mine farouche et déterminée de ceux qui affrontent l’adversité au quotidien. Une gangue d’austérité autour de la Flamme. Les étoffes bariolées qui les couvrent, les parfums doucereux d’épices et de fruits qui les nimbent contrastent avec la rigueur de leur tempérament.
Dans l’obscurité, elle imagine. Elle retrace les lignes du visage ; les lèvres minces, le pli du sourcil, le saillant des pommettes. Un visage, oui. La peau frappée de cuivre, le vert glacé des prunelles où rien ne se révèle. Sous ses doigts elle sent la sève qui pulse lentement dans la chair. Tout un monde étranger qu’elle effleure, encore hors d’atteinte. Elle cherche sur l’épiderme les cicatrices et les tatouages comme on remonte une piste, attentive à chaque indice, chaque empreinte qui pourrait lui ouvrir un chemin.
C’est un pays de chimères et de mirages à la beauté torve et hypnotique. Il est frontière. Il a la couleur des chutes où l’orgueil mordra.
L’aube impudente se glisse dans la chambre, flatte ses épaules d’un fluide collier de lumière et met fin à la rêverie. Sur les murs, les premiers rayons pâment les riches tentures de couleurs criardes. L’opulence, le luxe du Manoir devient insupportable. Elle se dégage, se soustrait à la morsure du désert en laissant ses pas à la croisée des chemins.
Elle reviendra ; poursuivre le voyage.
Aucun signe, au seuil de l’azur, de quelque trace frêle de vie.
Tout est effacé. Il n’y a plus ni terre ni mer, ni plaines ni montagnes ; il n’y a plus que les amas croulants de cette épaisse poussière dorée d’un monde qui a du éclater.
C’est une vaste terre brune austère et inhospitalière. Tanaris n’est pas une destination de voyage. Tanaris n’est pas une terre que l’on chérit. On maudit son haleine brûlante, l’aridité de son cœur, l’inflexibilité de son caractère.
Une main remonte sur sa hanche, glisse lentement sur son flanc comme pour en apprivoiser le relief. C’est une main calleuse, sèche. Celle d’un guerrier habitué à serrer une arme dans sa paume. Elle est également pudique, d’une étrange douceur. Elle laisse sur la peau blanche de la chaleur et un parfum d’abricot.
Il faut aiguiser ses sens pour braver Tanaris. Ici l’ironie cinglante des bourrasques qui assèchent la gorge. Ici le ciel est dégagé. Nu et solitaire, il pèse de son bord tranchant sur l’horizon. Il respire. Resserre l’étreinte de ses bras autour d’elle. Ses lèvres touchent le front. Il la frôle jusqu’au sang. Là-bas il y a du bruit. Celui d’une source. Là-bas se dessinent de hautes silhouettes dont les pas soulèvent une fumée âcre. Hommes, femmes et enfants ont la même mine farouche et déterminée de ceux qui affrontent l’adversité au quotidien. Une gangue d’austérité autour de la Flamme. Les étoffes bariolées qui les couvrent, les parfums doucereux d’épices et de fruits qui les nimbent contrastent avec la rigueur de leur tempérament.
Dans l’obscurité, elle imagine. Elle retrace les lignes du visage ; les lèvres minces, le pli du sourcil, le saillant des pommettes. Un visage, oui. La peau frappée de cuivre, le vert glacé des prunelles où rien ne se révèle. Sous ses doigts elle sent la sève qui pulse lentement dans la chair. Tout un monde étranger qu’elle effleure, encore hors d’atteinte. Elle cherche sur l’épiderme les cicatrices et les tatouages comme on remonte une piste, attentive à chaque indice, chaque empreinte qui pourrait lui ouvrir un chemin.
C’est un pays de chimères et de mirages à la beauté torve et hypnotique. Il est frontière. Il a la couleur des chutes où l’orgueil mordra.
L’aube impudente se glisse dans la chambre, flatte ses épaules d’un fluide collier de lumière et met fin à la rêverie. Sur les murs, les premiers rayons pâment les riches tentures de couleurs criardes. L’opulence, le luxe du Manoir devient insupportable. Elle se dégage, se soustrait à la morsure du désert en laissant ses pas à la croisée des chemins.
Elle reviendra ; poursuivre le voyage.